Les marchés privés, une classe d'actifs incontournable pour les GFI et leurs clients

Au cours de la dernière décennie, les marchés privés (capital-investissement, infrastructure, dette privée et immobilier) ont connu une période de croissance continue exceptionnelle, les actifs mondiaux sous gestion ayant plus que triplé, passant de 3’600 milliards de dollars en 2013 à un montant estimé à 13’500 milliards de dollars à fin 2023[1]. Jusqu'au début des années 2010, cette classe d'actifs était principalement réservée aux investisseurs institutionnels, aux fonds souverains et aux family offices en raison de coûts d'entrée élevés et de périodes d'illiquidité relativement longues ; toutefois ces dernières années, elle est devenue de plus en plus populaire auprès des grandes fortunes.

 

Aurélie Maillard
Responsable des marchés privés, Société Générale Private Banking Europe
Christophe Cantala
Responsable du marché des GFI, Société Générale Private Banking Europe

 

Un attrait durable et constant

Face à l'appétit croissant des clients fortunés pour les marchés privés et au changement de paradigme macro-économique qui a vu l'inflation, les taux d'intérêt et la volatilité des marchés financiers s’envoler presque simultanément, les GFI ont dû repenser leurs stratégies d'allocation afin d’intégrer davantage de diversification au sein des portefeuilles de leurs clients. En effet, ils ont dû passer d'une gestion d'actifs traditionnelle, axée principalement sur les actions et les obligations, à une approche plus flexible incluant des classes d'actifs alternatives, parmi lesquelles les marchés privés sont particulièrement appréciés, un nombre croissant d'investisseurs souhaitant placer leur argent dans des actifs perçus comme plus en lien avec l'économie réelle et plus tangibles. Cette stratégie implique donc des horizons de placement plus longs, typiquement entre cinq et dix ans, mais offre la perspective de rendements plus élevés, en particulier dans le contexte macro-économique actuel, grâce notamment à des allocations décorrélées des marchés financiers et de leur volatilité renouvelée.

L'engouement de la clientèle fortunée pour les marchés privés n'est du reste pas nouveau, puisqu'ils ont constitué une alternative bienvenue aux actions et aux obligations dans la période pré-COVID, où les marchés financiers étaient plutôt moroses et où les stratégies conventionnelles n’étaient pas nécessairement les plus performantes. Ils sont également sous les feux des projecteurs médiatiques depuis un certain temps, et les investisseurs privés, dont beaucoup ont pu lire des articles élogieux sur leurs rendements attrayants, veulent leur part du gâteau, même s'ils ne peuvent ou ne veulent pas engager les sommes à sept chiffres généralement investies par les institutionnels.

 

Ouvrir les marchés privés aux clients fortunés

Pour les investisseurs, les principaux défis liés aux marchés privés demeurent l'accès et la sélection. Les coûts d'entrée peuvent être extrêmement élevés, la plupart des fonds les plus populaires sont déjà sursouscrits, et l'expertise en matière de due diligence nécessaire pour identifier les investissements prometteurs n'est pas à la portée de tous. Les GFI sont confrontés aux mêmes challenges et, bien que certains des acteurs les plus importants du marché aient embauché des spécialistes des private markets pour acquérir ce savoir-faire spécifique en interne, ces compétences restent assez rares et coûteuses, alors même que les GFI pourraient bien ne pas en avoir besoin à long terme.

Dans ces circonstances, les GFI qui cherchent à répondre aux attentes de clients sophistiqués peuvent s'associer avec des établissements à même de leur fournir à la fois des véhicules investis sur les marchés privés et l’expertise ad hoc. Après tout, l'externalisation a fait ses preuves depuis des années en tant que stratégie de développement commercial lorsqu'elle est utilisée à bon escient. Dans ce cas, il serait parfaitement sensé pour un gestionnaire d'actifs indépendant de s'associer à une banque privée ou à un autre spécialiste de la classe d'actifs afin d'avoir accès à une offre en architecture ouverte, couvrant l'ensemble du spectre de la classe d'actifs, afin de construire des portefeuilles clients réellement robustes et diversifiés, que ce soit en matière d'instruments, de stratégies, de gestionnaires, de géographies ou de millésimes.

De fait, l'effet d'échelle qui consiste à rassembler un grand nombre d'investisseurs réduit proportionnellement le coût d'entrée. A titre d'exemple, Société Générale Private Banking Suisse propose un accès aux marchés privés avec un investissement initial minimum de 125’000 CHF offrant le même niveau de sophistication que celui habituellement réservés aux investisseurs institutionnels.

En outre, le fait d'être soutenu par une banque experte signifie que les GFI ne sont plus limités à la simple distribution de fonds, mais peuvent construire des portefeuilles/stratégies sur mesure, diversifiés et résilients qui répondent aux spécifications de clients aguerris. L'accès à la classe d'actifs devient ainsi plus fluide, tant pour les GFI que pour leurs clients. Cela est particulièrement vrai si un processus de nominee est mis en place, la banque se chargeant des processus d'onboarding et de gestion des transactions. Dans le cas contraire, le GFI devra onboarder chaque client auprès de chaque gestionnaire d'actifs, ce qui représente une charge de travail importante et superflue.

De plus, pour les GFI, externaliser la gestion des actifs de marchés privés de leurs clients auprès d'un partenaire expert est aussi la garantie de bénéficier d'un reporting régulier et transparent sur la performance de leur portefeuille, offrant une vision claire des sous-jacents d'une classe d'actifs pour laquelle l'information publique est généralement limitée. Ce qui, pour une clientèle souvent exigeante, très courtisée et financièrement avertie, constitue un véritable atout.

 

Exploiter pleinement le potentiel des marchés privés

Avec le bon partenaire, les GFI et leurs clients peuvent également utiliser cette classe d'actifs comme collatéral pour générer une performance financière supplémentaire grâce à une LTV[2] avantageuse , ce qui leur permet de tirer profit d'un capital par ailleurs potentiellement lucratif mais immobilisé. A titre d’illustration, les fonds distribués par Société Générale Private Banking Suisse peuvent offrir une LTV minimale de 25% auprès de la Banque. Cette stratégie présente un double avantage : pour le tiers gérant, elle permet d'augmenter le volume de ses actifs sous gestion ; pour le client, elle permet de capter d'autres sources de performance financière et, in fine, de faire fructifier son patrimoine.

De surcroît, les marchés privés permettent un degré élevé de personnalisation, non seulement en matière d'actifs sous-jacents, mais aussi du point de vue des sensibilités des clients. Par exemple, les investisseurs soucieux des questions de développement durable peuvent pleinement intégrer les critères ESG[3] dans leur stratégie d'investissement, à la fois dans le processus de due diligence, tout au long du cycle de vie du portefeuille, mais aussi en influençant les décisions stratégiques des entreprises dans lesquelles ils investissent. Dans un autre registre, pour les GFI qui cherchent à se développer au Moyen-Orient, les marchés privés peuvent pleinement répondre aux besoins plus spécifiques de clients qui souhaiteraient aligner leurs investissements sur les principes de la charia, à condition que le partenaire avec lequel ils travaillent propose ce type de service.

En définitive, les marchés privés constituent désormais une classe d'actifs à part entière que les GFI ne peuvent plus ignorer, tant pour leurs avantages en matière de diversification de portefeuille et de performance financière que pour répondre à la demande croissante de clients fortunés. Les gérants indépendants qui souhaitent saisir cette opportunité ont dès lors deux choix : acquérir ces compétences en interne, via un processus potentiellement long et coûteux, ou s'appuyer sur un partenaire spécialisé, qui dispose déjà de cette expertise et des ressources nécessaires pour la maintenir dans le temps.

 

 

Biographies

Aurélie Maillard a débuté sa carrière en 2014 en tant que banquier au sein de la Banque Privée 1818. Elle a ensuite rejoint Flexstone Partners en 2017 en tant que vice-présidente au sein de l'équipe Relations Investisseurs & Business Development. En 2022, elle est nommée Responsable des marchés privés pour Société Générale Private Banking Europe.
Aurélie Maillard est diplômée de l'université de Sheffield Hallam, de l'UPEC, de l'université Jean Moulin Lyon 3 et d'EM Lyon Business School.

Christophe Cantala a débuté sa carrière chez BNP Paribas en 2004. En 2012, il est nommé Chef de cabinet du Responsable pays pour la Suisse. Après avoir rejoint la division CIB en 2014, il intègre le département Wealth Management en 2019. En janvier 2023, il rejoint Société Générale Private Banking (SGPB) Suisse et, en octobre 2023, il est nommé Responsable du marché des GFI pour SGPB Europe.
Christophe Cantala est diplômé de l'ESC Toulouse et de l'ENS Paris-Saclay.

 

 

[1] Source : Preqin
[2] Loan-to-value
[3] Environnementaux, sociaux et de gouvernance